Source : Magazine - Casus Belli HS17, proposé par Fenryll.
Thème : Aventure
Joueurs : 4 / 6
Difficulté : Difficile
Lecture : ~30mn. (7261 mots)
Découverte Gestion de personnes Infiltration Organisation
A l'époque de la construction des Bibliothèques suspendues, le magiocrate Huidemar conclut un pacte avec un seigneur nain du nom de Bergen Blodwel. En échange d'importants subsides, les nains acceptèrent de construire et d'entretenir les installations permettant de puiser peau d'une rivière souterraine afin d'irriguer les futurs jardins de la cinquième terrasse et d'alimenter les fontaines publiques. La communauté naine employée à cette tâche construisit une vaste cité sous les Bibliothèques suspendues et abandonna peu à peu l'entretien des installations aériennes - moulins et aqueducs - qui fut confié aux semi-nains.
Pour obtenir l'accord de Blodwel, Huidemar se vit contraint de lui promettre bien plus qu'une fortune en or et pierres précieuses. Il lui jura d'offrir à chaque seigneur nain de la lignée des Blodwel la possibilité d'utiliser sept fois dans sa vie le Sablier de Fail, secret de son immortalité.
Cet artefact de grande puissance appartenait depuis plusieurs siècles déjà au magiocrate et avait le pouvoir de suspendre pendant sept ans le vieillissement de celui qui le retournait. Sept années étant nécessaires pour que le contenu du sablier s'écoule entièrement, une seule personne pouvait espérer en bénéficier et gagner la vie éternelle. Toutefois, le magiocrate usait de ce pouvoir depuis si longtemps que son espérance de vie avait de toute manière dépassée celle du plus résistant des elfes.
Le temps passa. Chaque seigneur nain du mont Pastel vit son espérance de vie allongée de quarante-neuf ans, à la plus grande joie de ses sujets qui lurent dans cette exceptionnelle longévité un signe de prospérité, C'est alors que le Sablier de Fail révéla un autre de ses pouvoirs. Pour prix de son immortalité, le corps du magiocrate devint peu à peu incapable de retenir son esprit.
Alchimistes, prêtres et médecins tentèrent de trouver un remède à cette étrange maladie, mais sans succès. Et un jour, l'esprit d'Huidernar se détacha définitivement de son corps, qui eut droit aux fastes d'une somptueuse cérémonie funéraire. D'abord désemparé, il se réfugia dans la bibliothèque de Philias et prépara son retour.
Cent ans après sa mort, Huidemar se sentit suffisamment fort pour tenter de s'emparer du corps d'Andréas d'Outrepart, un homme de faible caractère devenu depuis peu maître bibliothécaire du collège de magie. Une première tentative se solda par un échec. Le second essai fut couronné de succès et nul ne s'aperçut de rien dans l'entourage du maître bibliothécaire. Dès lors, Fluidemar commença à travailler à la reconquête des Bibliothèques suspendues.
Les chiens de guerre
Ces temps de pénurie sont une bénédiction pour un marchand tel qu'Olsen. Il a donc décidé de se joindre aux caravanes qui transportent l'eau des oasis vers la cité et il propose aux personnages appartenant à son escorte de se joindre à lui. Qu'ils décident ou non d'accepter, les événements vont les rattraper et mettre entre leurs mains l'avenir des Bibliothèques suspendues. Un soir qu'ils se sont aventurés un peu trop tard dans le quartier des diplomates, les personnages sont surpris par la nuit et retournent vers leurs tentes en suivant une rue mal éclairée, Arrivé au bord de la troisième marche, l'un d'eux discerne au bout de la rue une ombre de petite taille qui semble jaillir de derrière un escalier de pierre, ombre bientôt rejointe par une demi-douzaine d'autres tout aussi agressives, à l'allure simiesque et armées de cimeterres. Un bref combat se déroule devant les yeux des PJ, suivi d'un cri d'agonie et du bruit de la chute d'un corps. Six Orques entourent le cadavre d'un nain et, apercevant brusquement les personnages, se précipitent silencieusement dans leur direction. Les Orques se montrent étonnamment agressifs et combattent jusqu'à la mort. Ils ont l'intention de ne laisser aucun survivant et pourchassent tout fuyard. Avant la fin du combat, une patrouille de trois toges noires intervient et les aide à se débarrasser des créatures. La victime des Orques est morte sur le coup, poignardée dans le dos. C'est un nain à peine sorti de l'adolescence comme en témoigne sa barbe encore peu fournie. Sa hache démanchée à ses côtés et il porte un uniforme militaire lacéré et taché de sang. Dans tous les cas, le combat terminé, une toge noire masquée demande aux personnages de la suivre en direction de la forteresse cornue.
Le Concile
Accompagnés d'une demi-douzaine de toges noires, les personnages franchissent la lourde porte de bronze qui garde l'entrée de la forteresse cornue. De menaçantes gargouilles grimacent au-dessus de leurs têtes. Ils passent quelques heures à attendre dans une pièce à l'ameublement spartiate. Enfin, la porte s'ouvre et d'autres toges noires les conduisent en dehors de la forteresse ce) attendent une escorte à cheval et une monture pour chacun. Ensemble, ils traversent au petit trot les marches de la cité, franchissent l'arche des jardins et continuent en direction du palais du magiocrate. On les guide alors à travers un dédale de couloirs et d'escaliers jusqu'au sommet de la tour, dans une immense pièce en ogive aux murs tendus de soieries carmin. A la lueur des braseros, sept personnages assis dans des fauteuils ouvragés font cercle autour d'une table : Asconius. Andruval, Belgor, Eregone, Fauchevent, Tristemine et Oreel. Les personnages ont en présence du Concile. C'est Asconius qui s'adresse le premier aux personnages :
« En ma qualité d'archiviste du collège d'astronomie et représentant de maître Titelune, je vous prie d'abord d'accepter mes excuses pour la manière dont vous avez été conviés à cette réunion extraordinaire du Concile. Il est inutile que je vous brosse un tableau de notre triste situation. Bien que vous soyez ici depuis peu, vous avez eu tout loisir de constater par vous-mêmes les difficultés que nous traversons. Je n'irai donc pas par quatre chemins. Votre rencontre de ce soir nous renforce dans la conviction qu'il se passe quelque chose de grave au royaume des nains. Le Concile a donc décidé d'envoyer un émissaire dans les sous-sols de la cité pour comprendre quels malheurs les frappe et dans quelle mesure il est possible d'y remédier. Une escorte est naturellement indispensable à la réussite de cette délicate mission. Et comme par ailleurs il serait préjudiciable pour le moral de la population que votre mésaventure s'ébruite, nous avons tout naturellement pensé à vous. »
Les personnages doivent comprendre qu'ils n'ont guère le choix. S'ils refusent ils risquent d'être mis en quarantaine sous un prétexte fallacieux pour éviter que les habitants s'affolent et imaginent une horde d'Orques prête à envahir la cité. Asconius répondra à toutes leurs questions dans la limite de ce qu'il sait, autrement dit peu de choses. Il ignore tout de la véritable Identité d'Andréas d'Outrepart. Selon lui, il est hautement improbable que le labyrinthe des nains soit tombé aux mains des Orques . Si les personnages s'étonnent que le Concile ne fasse pas appel aux toges noires pour escorter l'ambassadeur de la cité, Karl Tristemine prend la parole :
« Des tensions existent depuis trop longtemps entre maître Fauchevent et maître Beowulf, le représentant de Carlsen Blodwel. De plus, il est apparu au début des événements que des éléments mal contrôlés existaient au sein de l'ordre des toges noires, et que certains n'ont pas hésité à s'en prendre à la communauté naine du quartier des artisans ».
A ces mots, Astride Fauchevent se lève sans un mot et quitte la salle.
Si les personnages acceptent, ils sont invités à se restaurer dans de somptueux appartements où ils passent le reste de la nuit, Des serviteurs se chargent de récupérer leurs affaires laissées dans le quartier des caravanes, Au matin, ils sont réveillés par une toge noire, le visage découvert, qui les conduit devant la fontaine des douze dragons. S'ils refusent la mission, ils sont jetés au Gnoûhouf et le Concile, après les avoir laissés mariner une journée dans la fange, au milieu des rats et de la vermine, devrait trouver les arguments pour les convaincre.
La compagnie
Les personnages sont présentés aux trois hommes qu'ils vont accompagner dans les profondeurs de la cité.
Les dessous de l'histoire
Huildemar, après s'être assuré la maîtrise du collège de magie, a décidé de passer à la suite de son plan. Au cours d'un voyage au coeur du désert, il s'est allié une tribu d'Orques nomades en leur promettant les richesses de la cite des nains. Il a ensuite obtenu la coopération de quelques venteux. L'un d'eux, Tomas Adamus , lui a fourni les indications nécessaires pour lancer une attaque surprise contre la cité. Une nuit, les Orques s'introduisirent dans le labyrinthe par la rivière souterraine et de petits groupes prirent rapidement le contrôle des sorties. Simultanément, le gros de l'armée orque se lança à l'assaut de la cité au coeur du mont Pastel. Nombre de nains périrent, surpris dans leur sommeil avant d'avoir pu s'emparer de leur hache. Les survivants furent regroupés dans des galeries abandonnés et emmurés vivants... Seule une cinquantaine d'entre eux parvint à s'échapper mais, toute retraite leur étant coupée, ils ne purent rejoindre la surface. Ils se terrent en un lieu caché dans l'attente d'un hypothétique secours. L'un d'eux a tenté une sortie et son périple s'est achevé dans une ruelle du quartier des diplomates...
A l'abri des tours fortifiées du collège de magie, le magiocrate met tout en oeuvre pour garder secrète l'invasion de la cité des nains. Il a fait fermer tous les passages menant l'eau de la rivière vers les fontaines des Bibliothèques suspendues et attend patiemment que la ville soit suffisamment affaiblie pour lancer l'ultime assaut.
L'embuscade ?
Les nains survivants en état de combattre sont au nombre d'une vingtaine. Prisonniers de leur propre royaume, ils quittent de temps à autre leur refuge pour piller les réserves d'eau et de nourriture. Trois d'entre eux ont repéré les personnages à leur entrée dans le labyrinthe. Ils les surveillent discrètement, empruntant des passages dérobés connus d'eux seuls et prenant soin d'éviter les Orques qui, eux aussi, suivent de loin en loin les personnages.
Au moment opportun, 1es trois nains passent à l'action. Ils doivent contraindre les personnages à les suivre le plus rapidement possible, sans se perdre en explications qui laisseraient aux Orques le temps d'intervenir. Semblant surgir d'un mur, ils passent aussi vite que possible devant le groupe et s'évanouissent dans l'obscurité. S'ils le peuvent, ils dérobent un objet susceptible d'entraîner les personnages à leur suite : une outre d'eau, une arme, le livre de sorts d'un magicien...
Poursuivant les nains, les personnages se trouvent rapidement avec une douzaine d'Orques à leurs trousses, au risque de ne rien y comprendre. Les Orques sont désormais contraints d'éliminer les membres de l'expédition pour éviter que leur présence ne soit révélée. Parvenus dans une salle spacieuse, les nains empoignent leurs haches, le visage déformé par la haine, et se précipitent sur les Orques . D'abord indécis, Arnault se range à leurs côtés, l'épée haute. Le combat s'engage et tourne rapidement en une mêlée sanglante. Au plus fort de l'action, emporté par la folie guerrière, Adamus perd pied, se trahit et fracasse d'un coup de masse le crâne d'un nain.
Un camp d'irréductibles
Le combat achevé, les personnages pansent leurs blessures et peuvent interroger les deux nains survivants. Jurt et Bjorg leur relatent par le menu les circonstances de la prise de leur cité par les Orques . Adamus, s'il est encore en vie, révélera sans trop de difficulté qu'un mystérieux personnage l'a chargé voici trois ans de relever l'ensemble des accès au labyrinthe. Son physique aidant, il lui fut facile de se glisser parmi la population naine et de cartographier les renseignements voulus. Il ajoutera qu'il ne leur sert à rien de le savoir car ils ne sortiront jamais vivants du labyrinthe, dont chaque issue est obstruée ou sévèrement gardée. Les personnages devront faire preuve de beaucoup de persuasion pour empêcher Jurt et Bjorg de tailler en pièces le responsable de leurs malheurs...
L'expédition emboîte le pas des deux nains qui les conduisent jusqu'à leur retraite. C'est une faille à ciel ouvert, au coeur des jardins de la cinquième marche. Les parois sont trop abruptes pour être escaladées, mais un escalier est sur le point d'être achevé qui devrait permettre d'accéder au bord de la faille. Les nains se sont installés au fond de la crevasse et vivent misérablement depuis un mois. Ainsi perdus dans les jardins, il leur a été impossible d'avertir l'extérieur.
Sans doute existent-ils d'autres passages secrets inconnus des Orques tel que celui-ci, mais aucun des patriarches susceptibles de le savoir ne se trouve ici. La plupart des réfugiés sont de jeunes guerriers à l'instruction, les cadets de l'école militaire des Forges d'Airain. En manoeuvre dans cette partie du labyrinthe au moment des événements, ils ont eu la chance d'échapper aux Orques .
Un enfer au paradis
Après trois jours de travaux et au prix d'efforts surhumains (surnains ?), l'escalier grossièrement taillé avec les quelques outils dont dispose la petite communauté parvient au sommet de la faille. Les personnages, accompagnés de Jurt, Bjorg, Gravechemin et Arnault vont pouvoir tenter de rejoindre le collège de botanique et de zoologie. La traversée des jardins est longue et périlleuse, rendue pénible par une végétation d'une incroyable densité qui ne semble en rien affectée par la sécheresse. Les nains sont particulièrement mal à l'aise dans ce décor oppressant. Des créatures reptiliennes glissent dans l'ombre et font s'agiter les fougères arborescentes et les orchidées géantes. La chaleur est étouffante, sans qu'un souffle d'air vienne soulager les voyageurs. Enfin, après une éternité passée dans cet enfer aux allures de paradis, la troupe parvient au pied du collège. A peine arrivés, ils sont accueillis par Oreel Boisvert. L'elfe vénérable se présente à eux vêtue d'une robe évanescente, la taille ceinte d'une chaîne d'or et d'argent figurant un lierre.
Dame Oreel laisse le temps aux personnages de reprendre quelques forces avant d'écouter le récit de leurs aventures. Elle ne pose aucune question à Jurt et Bjorg, bien que nombre d'assesseurs et d'initiés du collège posent sur eux des regards chargés d'espoir ou de colère. Après qu'il se sont restaurés, dame Oreel prend connaissance du périple des personnages. Elle hoche gravement la tête et s'adresse à eux en ces termes : « Hélas, vous êtes vaillants mais arrivez trop tard. Andréas d'Outrepart a fait la preuve avant-hier de sa félonie. Des Orques ont surgi par centaines des caves du collège de magie et massacré sans pitié assesseurs et initiés. Seuls quelques novices ont eu la chance d'échapper à ces créatures maudites et ont rapporté les faits suivants : Andréas a été vu, lançant sortilège sur sortilège contre ses élèves et ses collaborateurs. Il ne fait aucun doute qu'il est l'instigateur de cette invasion. Pour l'heure, lui et ses immondes alliés se sont retranchés dans les deux tours du collège et encerclent le palais du magiocrate. L'accès à la huitième marche est défendue par des fortifications de fortune. Maitre Fauchevent et ses toges noires se préparent à donner l'assaut. Je crains que les temps à venir ne soient plus sombres encore que nous l'avions craint ». Dame Oreel laisse un moment peser le silence, après quoi elle prend congé des personnages et les laisse se reposer.
Les révélations d'Ermelin Leys
Les personnages demeurés au collège de sciences naturelles peuvent assister à la bataille depuis le balcon de la chambre qui leur a été fournie. Alors que les toges noires refluent inexplicablement, un serviteur frappe à la porte et annonce qu'Ermelin Leys, assesseur du collège de magie, souhaite s'entretenir avec eux. C'est un homme timide et bedonnant, aux cheveux poivre et sel et aux grands yeux étonnés. Ermelin est un des rares survivants du combat de l'avant-veille. A ce titre, il pourra confirmer les dires de dame Oreel. Mais le but de sa visite n'est pas là. Au début de sa carrière d'assesseur, il y a une dizaine d'années, Ermelin a servi d'espion a Asconius au sein du collège de magie, En échange de sa collaboration, l'archiviste du collège d'astronomie lui a permis d'accéder secrètement à la bibliothèque de Philias et d'y consulter les ouvrages de son choix. Un soir où il se trouvait dans la bibliothèque interdite et y déchiffrait fébrilement les pages d'une antique relique, il fut terrorisé par une apparition : « un spectre à la ressemblance de maitre Andréas d'Outrepart s'avançait vers moi. Fou de terreur je me suis précipité par le passage secret d'où j'étais venu et jamais plus je ne remettais les pieds en ce lieu ». Bien sûr, Ermelin n'a pu parler à personne de cette effrayante aventure, sous peine de révéler qu'il avait espionné pour le compte d'Asconius. Il résolut donc de se taire. Mais, au regard des récents événements, il a acquis la certitude qu'un esprit malin se dissimule derrière les traits d'Andréas, et que le véritable bibliothécaire erre quelque part dans la bibliothèque de Philias.
Ermelin a choisi de s'adresser aux personnages dans l'espoir que son secret ne soit pas divulgué et qu'il puisse continuer d'étudier au collège de magie... pour autant qu'il rouvre ses portes un jour. Son repentir est sincère et, par ailleurs, il est tout disposé à accompagner les personnages jusque dans la bibliothèque de Philias.
La bibliothèque de Philias
Comme le précise Ermelin aux personnages, le passage secret qui mène à la bibliothèque de Philias débouche à l'extérieur des Bibliothèques suspendues. Il faut donc tromper la vigilance de la garde pour quitter la cité, par exemple en se laissant descendre le long d'une corde jusqu'au pied des remparts. La tâche est rendue facile par le peu de toges noires qui patrouillent sur les remparts.
Les personnages cheminent à présent en direction d'un rocher qui affecte étrangement la forme d'un livre ouvert. Sous le rocher s'ouvre une crevasse très étroite où il n'est possible de pénétrer qu'avec un minimum d'équipement. Pour Ermelin , impossible de poursuivre plus avant. « Il est vrai que j'étais bien plus maigre il y a dix ans. J'espère que vous ne m'en voudrez pas... ».
Les personnages continuent donc seuls, avec pour tout bagage des armes légères, quelques bougies et les derniers conseils d'Ermelin : « Au croisement, prenez la galerie qui monte. L'autre mène au labyrinthe des nains ». Effectivement, le boyau tortueux se sépare bientôt en deux branches. Après une courte escalade, les personnes parviennent dans un couloir taillé dans la roche rouge du plateau Écarlate où ils peuvent se tenir debout. Une longue ligne droite les conduit dans les fondations du palais du magiocrate et il leur faut alors grimper de poutre en poutre, cheminant à l'intérieur d'un des murs de la tour.
Enfin, l'un d'eux aperçoit une petite porte. Elle s'ouvre en couinant et les personnages pénètrent dans le saint des saints, la bibliothèque interdite de Philias.
La bibliothèque de Philias est un autre genre de labyrinthe que celui que les personnages ont visité quelques jours auparavant. Il semble que personne n'ait visité certains de ses couloirs depuis des décennies. Chaque pas laisse de profondes empreintes dans une épaisse couche de poussière et le moindre mouvement soulève nuage de particules. Après quelques minutes, il est difficile de s'empêcher d'éternuer.
Sans doute les personnages n'ont-ils pas la moindre idée de la façon de procéder pour entrer en contact avec un fantôme. Si un magicien ou un clerc dispose de sortilèges à cet effet, ne le privez pas du plaisir de les utiliser. Dans le cas contraire, après avoir erré de longues heures parmi les étagères encombrées de livres mais aussi de tablettes, de fioles... une forme se matérialise devant les personnages, s'aidant de la poussière pour acquérir une apparence humaine. A moins qu'ils ne l'aient déjà vu (peut-être lors de l'assaut du collège de magie), ils ne reconnaitront pas Andréas d'Outrepart. Il se présentera alors d'une voix ténue, à peine perceptible. Son séjour ici l'a rendu à moitié fou. Il est parfois incohérent et peut sembler dangereux, mais sa forme lui interdit toute agression physique.
Entre deux phrases vides de sens, il pourra révéler l'identité de celui qui occupe aujourd'hui sa place : Huidemar le magiocrate, fondateur des Bibliothèques suspendues !
Bientôt, d'autres fantômes apparaissent et se réunissent autour des personnages. Il s'agit des seigneurs nains de la lignée des Blodwel qui, après avoir usé des pouvoirs du sablier de Fail, ont subi à leur mort le même sort que le magiocrate, Parmi eux, Bergen Blodwel, premier seigneur nain du mont Pastel, a conservé intacte sa raison et sa force de caractère. Il peut expliquer aux personnages la nature véritable du pacte passé autrefois entre lui et le magiocrate : « Il n'est qu'un moyen de nous libérer tous. Retrouver le sablier de Fail et le briser. Alors prendra fin ce calvaire et Huidemar n'aura d'autre choix que de mourir et ne plus jamais revenir parmi les vivants. ».
Il ajoutera « Quand disparut le magiocrate, mon peuple s'empara secrètement du sablier de Fall. Une seule personne doit savoir aujourd'hui où il se trouve : mon descendant, Carlsen Blodwel. Cette visite de la bibliothèque de Philias peut sembler une occasion inespérée pour un personnage malhonnête de s'emparer d'un grimoire de valeur inestimable ou d'une relique aux pouvoirs insoupçonnés. Toutefois, certains des esprits qui hantent ce lieu ont une autre tâche que de partager leur savoir avec les visiteurs : le voleur imprudent devra affronter une Âme en peine.
Le roi sous la montagne
Après bien des péripéties, les personnages parviennent enfin en vue de la mythique cité naine. Éclairée par la lueur de centaines de lanternes elle s'étend sur la berge d'un lac souterrain d'où partent les conduits destinés à alimenter en eau les fontaines des Bibliothèques suspendues. Son architecture est massive, avec des tours trapues qui entourent le port et gardent les principaux accès au labyrinthe. Plusieurs barges mouillent dans le port, ainsi que de petits radeaux orné d'ossements, de fabrication orque sans aucun doute. Le campement des Orques , justement, est installé entre le port et la ville. Ces créatures répugnent à habiter les constructions des longues-barbes, de peur de tomber dans un de leurs pièges diaboliques et d'être avalé par la montagne. Seule la forteresse du seigneur nain abrite les troupes d'élite de Dent Creuse , le chef de tribu.
Les personnages peuvent se dissimuler dans une forêt de champignons géants pour observer leurs ennemis. S'ils patientent suffisamment longtemps ils pourront profiter de l'occasion que leur offre la découverte des réserves de vin de la forteresse. Dans les heures qui suivent la mise en perce des meilleurs fûts du seigneur Blodwel, les Orques organisent une fête qui prend rapidement des allures orgiaques. En agissant avec discrétion et célérité, les personnages peuvent espérer franchir le pont qui relie les deux rives du lac, se faufiler parmi les tentes du campement et s'introduire dans la forteresse. Arrivé dans les geôles, peut-être rencontreront-ils quelques Orques plus sobres que la moyenne. Et qui sait si Dent Creuse lui-même ne descendra pas interroger une nouvelle fois les prisonniers sur l'endroit où ils cachent leur or.
Carlsen Blodwel est seul dans sa cellule et très mal en point. Horriblement torturé à plusieurs reprises, il a toujours refusé de livrer l'emplacement du trésor à ses bourreaux, ce qui l'a sans doute sauvé. Inconscient, il doit être transporté au-dehors pour que lui soient administrés les premiers soins. Et c'est aux deux nains qui accompagnent les personnages qu'il acceptera de dire où se trouve le Sablier de Fait. Bjorg, alors, apaisera son seigneur et se tournant vers ses compagnons d'infortune : « Notre quête touche à sa fin. Il nous faut emprunter un radeau et descendre la rivière. »
Le sablier de Fail
Après s'être emparé d'une embarcation à fond plat, les personnages commencent à descendre la rivière souterraine. Son cours est tranquille et la navigation n'y pose aucun problème majeur. Après une petite heure, les torches éclairent le promontoire annoncé par Carlsen. Au prix d'une petite manoeuvre et de quelques jets de Dextérité, les personnages accostent sur une petite grève. Aidé de Bjorg et Jurt, le seigneur nain monte sur le promontoire et pose sa main droite sur la minuscule rune gravée sur la paroi. La roche frémit alors et une porte dérobée s'ouvre sans un bruit. Des torches s'enflamment aussitôt et illuminent le plus extraordinaire trésor que les personnages aient jamais eu le privilège de contempler.
« C'est sans doute plus que ne pourraient amasser dix dragons en dix siècles », murmure Jurt, les yeux écarquillés devant les monceaux d'or et de joyaux qui s'étalent à ses pieds. Tout au fond de la pièce, sur un piédestal de marbre, un sablier d'électrum, haut comme un enfant humain et magnifiquement ouvragé, brille de mille feux. Quand le premier des personnages s'en approche, les derniers grains de sable précieux finissent de s'écouler. L'occasion lui est donc donné de le retourner et de suspendre sept ans son vieillissement... pour autant qu'il ne craigne pas les conséquences de son geste. Jurt s'empare de sa hache et annonce froidement : « Il est temps d'accomplir ce pour quoi nous sommes venus, ne croyez-vous pas ? ». Si aucun des personnages ne bouge, le jeune guerrier nain brise lui-même le sablier d'un formidable coup de hache, qui entame même le piédestal. Un vent violent se déchaîne alors, soulevant le contenu scintillant du sablier. Le nuage de sable prend alors l'apparence d'Huidemar . Cet ultime avatar du magiocrate se précipite en sifflant sur les personnages.
A la surface, le corps sans vie d'Andréas d'Outrepart vient de tomber aux pieds de ses lieutenants Orques . Désemparés, ceux-ci ne tarderont pas à se disputer le commandement de l'armée orque, qui quittera bientôt les Bibliothèques suspendues par où ils sont venus, non sans avoir pillé de fond en comble le collège de magie. Les personnages seront accueillis en libérateurs par la population en liesse, d'autant que leur retour coïncide avec celui de l'eau des fontaines. Bjorg et Jurt n'auront pas tardé à ouvrir les conduites de la rivière souterraine.
Quel avenir pour les Bibliothèques suspendues ?
Le meneur de jeu est à présent maître de la destinée des Bibliothèques suspendues. Ce sanglant épisode de son histoire sera-t-il le coup de grâce ou le signe de la fin de son déclin ? Sans doute le collège de magie, ses bibliothèques livrées aux flammes par les Orques , n'ouvrira jamais plus ses portes ce qui n'est peut-être pas un mal. D'autres nains viendront-ils peupler le labyrinthe ? Ou bien les venteux s'empareront-ils de la cité souterraine d'où ils durent autrefois s'exiler ? Il faudra encore que les toges noires reconstituent leurs rangs décimés par la guerre. Et ce, avant que les royaumes voisins ne s'intéressent de trop près aux Bibliothèques. Cette reconstruction donnera sûrement du travail aux aventuriers de tout poil...
Le magiocrate est beaucoup trop puissant pour être affronté directement par les personnages (ou pas qui que ce soit d'ailleurs). Après la destruction du sablier de Fail, son avatar a les mêmes caractéristiques qu'un Revenant.