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La revanche est éternelle

Source : Mordheim, proposé par Freedom.

« "Les Seigneurs de la Nuit ne se laisseront pas intimider par cette vermine !" tonna le Comte Vusitch et frappant du poing sur la table. Sa main fine et pâle fit tomber un verre de cristal en percutant le bois ouvragé, qui heurta la pierre du sol et se brisa en mille morceaux. Retrouvant sa contenance et son port altier, le vampire fit un geste à ses goules afin qu'ils le remplacent. Ces dernières se traînèrent dans une parodie d'étiquette, vêtues de costumes de domestiques sales et déchirés.

Il porta le verre à ses lèvres et but une longue gorgée de sang, avant que son regard ne se pose sur le visage encapuchonné de Keloch assis en face de lui.

Ce dernier ne semblait pas perturbé par l'accès de colère de Vusitch et s'adressa sans la regarder à une créature voûtée située à sa droite. Sa voix était lente et mesurée :"Qu'en penses-tu Friedrich ?"

Friedrich était un être bossu, un monstre qui dissimulait ses malformations sous des haillons tachés de sang séché, mais ses yeux brillaient d'une lueur animale et il fixait Vusitch avec mépris.

"Cette vampire," commença-t-il, "s'en prend à ceux de sa propre espèce ?" La fin de sa phrase se perdit dans un grognement rauque.

"C'est une mercenaire" répondit une voix calme et envoûtante. Dame Isabette était la dernière des quatre seigneurs de la nuit présents. Elle se tenait assise à l'écart, cachée dans la pénombre. "Elle a dérobé un puissant artefact à ma maîtresse, un joyau appelé le Noctu."

"Nous connaissons très bien tes motivations, Lahmiane" la coupa Vusitch en se penchant vers elle, "et nous savons également l'importance de la prime mise sur sa tête. Mais ce qui nous préoccupe pour l'instant est le danger qu'elle fait peser sur nous et sur notre alliance." Pour appuyer ses arguments il étendit les bras, embrassant l'intérieur du relais routier où se déroulait la rencontre. Des corps vidés de leur sang étaient allongés ici et là. Les goules de Vusitch avaient commencé à en dévorer certains, du moins lorsqu'elles arrivaient à ne pas attirer l'attention de leur maître.

"Elle est effectivement une menace sérieuse pour nos opérations," acquiesça Keloch.

"Elle mérite notre vengeance, Keloch !" s'écria Isabette, perdant soudain sa contenance. "Ma maîtresse a envoyé ses agents en ville. Ils fouillent en ce moment même le quartier sud-est, là où elle a été vue pour la dernière fois. Serutat en personne va accoster sur ces rivages dans quelques jours afin de s'occuper de cette voleuse !"

"Intéressant," souffla Friedrich.

"Célébrons cette alliance alors," proposa Vusitch. Ses goules accoururent en l'entendant, certaines apportant un verre aux vampires tandis que les autres le remplissaient de sang.

"À l'alliance," dit Keloch en levant son verre.

Isabette hocha la tête. Ils trouveraient cette traîtresse, la feraient payer, et elle récupèrerait le Noctu de ses mains avant même qu'elle ne devienne poussière.

"Mort à la garce !" siffla Friedrich, sa langue frétillant entre ses dents alors que les goules versaient le liquide écarlate.

"À sa mort !" renchérit Vusitch avant de vider son verre d'un trait.

Keloch et Isabette étaient sur le point d'en faire autant lorsque le vampire porta la main à sa gorge. Son verre alla se briser sur la pierre, répandant ses éclats à côté du précédent, et son autre bras agrippa la table, si fort qu'il en arracha une pièce de bois. Une vapeur rougeâtre s'échappait de son cou, et il recula en battant l'air aveuglément, envoyant une de ses goules s'écraser contre le mur.

"De l'ail…" parvint-il à gargouiller.

Keloch bondit, balayant son verre d'un revers de la main. "Trahi…" il se figea en voyant le pieu qui dépassait de son thorax, puis se retourna et eut le temps de jeter une regard étonné à Friedrich avant de tomber en poussière.

"Il n'y aura pas d'alliance," dit alors celui-ci, sa voix distinctement féminine. Il tira des replis de ses loques une élégante arbalète de poing qu'il brandit vers les deux goules s'avançant vers lui. Les créatures furent littéralement projetées au mur et clouées par l'impact avant même de pouvoir réagir. Friedrich bondit en souplesse sur la table, abandonnant son arbalète au profit d'une longue dague. Il décapita deux autres goules d'un mouvement fluide avant d'effectuer un saut périlleux en arrière pour éviter une lame qui tentait de lui faucher les jambes.

"Toi !" Cria Isabette, ses yeux brillant de rage.

Friedrich eut un sourire en coin, puis rengaina son arme avant d'ôter son déguisement en riant.

"Les informations que tu m'as données sur les intentions de ta maîtresse me seront fort utiles" dit alors Marianna. La vampire se révélait sous son vrai jour. Elle portait des bottines de cuir noir et un bustier laissant entrevoir ses charmes. Tout un arsenal pendait à sa ceinture, dont une longue rapière qu'elle tira hors de son fourreau. Elle se mit en garde et sourit de nouveau, révélant ses longues canines.

"Après vous, Milady", la nargua-t-elle.

Dans un hurlement de rage Isabette se rua sur elle à une vitesse surhumaine, la pressant de ses attaques. Marianna avait du mal à parer tous les coups, mais Isabette commençait à fatiguer et sa fureur diminua. Elle put alors contre-attaquer et se mit à lui infliger de nombreuses blessures superficielles de sa lame enduite d'ail.

"Tu uses des armes des laquais de Sigmar contre les tiens" l'accusa Isabette en reculant, aveuglée par la douleur insupportable que lui infligeaient ses plaies. Il n'en fallait pas plus à Marianna. Elle para une attaque maladroite de sa rapière tout en dégainant sa longue dague, et décapita Isabette d'un geste consommé. Le corps de la vampire tomba en poussière avant même de toucher le sol.

"Tant que ça marche…" marmonna-t-elle. Du coin de l'œil, elle aperçut le Comte Vusitch.

Il rampait par terre, une main vainement posée sur sa gorge, puis parvint à se relever en s'accrochant à un pilier. Désespérement, il se mit à claudiquer vers la sortie.

Marianna fit volte-face et projeta sa dague directement dans son dos, l'empalant contre une poutre. Il se tordit de douleur avant d'exploser en un nuage de poussière, ne laissant que la lame profondément enfoncée dans les veines du bois.

"Il n'y aura pas d'alliance," se répéta-t-elle à elle-même. Sans attendre, elle rassembla ses affaires et monta les escaliers du relais routier. Elle se retourna rapidement pour voir un des parias de Keloch entrer dans la pièce et contempler d'un air hagard les trois tas de poussières qui avaient été des vampires. Il se baissa et ramassa une orchidée noire.

Satisfaite de savoir que son message préviendrait de futures alliances, Marianna s'enfonça dans la nuit : une bande de Marienburgers lui avait demandé de s'occuper d'un Capitaine Reiklander avant le lever du soleil, et tout le monde sait que les Marienburgers paient bien… »

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